Le Dibbouk (1937)

J’ai piqué un coffret de DVD de films yiddish à une amie. Dedans il y avait le Dibbouk (der dibek, דער דיבוק), que j’avais très envie de voir. Notamment parce que j’en avais entendu parler dans la méthode Assimil pour apprendre le yiddish. Fait amusant, tout le monde prononce dibbouk « Dibbouk » dans le film, comme en hébreu moderne, mais en yiddish normalisé par le YIVO, et de ce fait dans la méthode Assimil, le mot hébreu se prononce « Dibek ». Le Dibbouk est un classique du film yiddish, réalisé en Pologne par Michał Waszyński et sorti en 1937. Le film est tiré d’une pièce de théâtre de Shalom Anski, publiée en 1917. D’abord écrite en russe, Anski la traduisit ensuite en yiddish.

Dans le folklore juif, un dibbuk est un esprit qui prend possession d’un corps (la racine dalet, bet, kof, דב”ק, sert aussi à former des mots comme « colle », « coller »). Dans cette histoire, le dibbouk est Hanan, un jeune étudiant pauvre d’une yeshiva. Son père et un autre se promirent de marier leurs enfants alors que ceux-ci n’étaient pas nés. Le père du futur dibbouk mourut au moment de la naissance de son fils. L’autre père, Sender, fit fortune et oublia son ancienne promesse sans même chercher à savoir ce qu’il était advenu de la famille de son ancien ami.

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Appel à dons exceptionnel de la maison de la culture yiddish

La crise du COVID-19 nous touche et nous fragilise tous. C’est aussi le cas de la maison de la culture yiddish, un lieu qui emploie cinq personnes pour préserver un trésor inestimable. La plupart des événements étant annulés, l’argent rentre moins et met en danger la paie des employés. La maison de la culture yiddish fait un appel aux dons pour surmonter l’épreuve. Vous pouvez désormais adhérer et faire des dons directement via le web. Cela faisait plus d’un an que je me disais qu’il fallait que j’adhère, c’est maintenant fait, avec un petit don en plus. Et vous ?

http://www.yiddishweb.com/appel-a-dons-exceptionnel/

La maison de la culture yiddish a aussi ouvert un site « la culture yiddish à la maison » pour continuer ses activités durant le confinement. Vous y trouverez entre autre une nouvelle d’Avrom Reyzen que j’adore : le prolétaire, דער פּראָלעטאַריער. Je vous invite à la lire !

Acheter le dernier Etgar Keret en yiddish

Oui, je sais, j’ai dit que le blog était fini, mais mettons que là c’est un cas de force majeure. Etgar Keret a gagné le prix Sapir l’année dernière pour תקלה בקצה הגלקסיה, un problème à l’extrémité de la galaxie. Le prix Sapir apporte de l’argent à l’auteur, paie la traduction de l’œuvre vers l’arabe et vers une langue au choix du lecteur. Or Etgar Keret est déjà traduit dans plus de quarante langues. Quel langue pouvait-il bien choisir ? Hé bien il a choisi… Le YIDDISH !!! Et voici donc שטערונג אויפֿן ראַנד פֿון דער גאַלאַקסיע, shterung oyfn rand fun der galaksye.

Et aujourd’hui vous pouvez acheter ce livre de littérature contemporaine traduit vers le yiddish via la maison Leyvik, un centre de culture yiddish à Tel-Aviv. Le livre coûte 89 ₪ et les frais de port vers l’Europe sont de 60 ₪. Vous pouvez le commander ici.

Vous pouvez aussi regarder quelques photos réjouissantes d’une lecture publique de l’œuvre en présence de l’auteur, à la maison Leyvik.

Bon allez, et comme je suis de passage, je vous recommande l’album de cold wave des Zeévot (les Louves) qui vient de sortir aujourd’hui !

Moyshe Nadir — Ma première histoire d’amour

Après celui d’Avrom Reyzen, Ma première histoire d’amour (מיַין ערשטער ראָמאַן) est le deuxième livre de la collection Yiddish mini-bilingue que je lis, cette fois ci écrit par Moyshe Nadir (משה נאַדיר). Né en Galicie, Moyshe Nadir émigre à New-York à 13 ans, en 1898. Journaliste pour la presse yiddish newyorkaise, notamment la presse communiste, il écrivit aussi des pièces de théâtre et de la poésie. Ma première histoire d’amour est une grande nouvelle écrite à la première personne contant comment tous les élèves du kheyder d’un shtetl tombèrent éperdument amoureux de la fille d’un notable.

Ce qui m’a frappé dans cette nouvelle, c’est son contexte. Au moment où il l’écrit, Moyshe Nadir est newyorkais et communiste (et même antisioniste). Il est entré résolument dans la modernité et écrit des articles cinglants dans des journaux communistes. Quand il décrit un jeune garçon timide, suivant une éducation religieuse traditionnelle en Europe, habillé de manière traditionnelle, jurant sur ses tsitsit, il décrit une personne complètement opposée à celle qu’il est devenu.

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Avrom Reyzen — L’homme qui causa la chute du temple (2018)

Et voilà, le centre d’intérêt de ce blog s’éloigne un peu d’Israël et de l’hébreu pour s’intéresser aussi à une autre langue juive et sa littérature. Voici le premier livre que j’ai lu en yiddish : L’homme qui causa la chute du temple d’Avrom Reyzen (דער ייִד וואָס האָט חרובֿ געמאַכט דעם טעמפּל פֿון אַבֿרהם רייזען) sorti en 2018 dans la collection yiddish-minibilingues de la Bibliothèque Medem. La traduction est de Nadia Déhan-Rotschild.

Qu’est-ce que j’aurais aimé avoir un tel recueil quand je m’initiais à la littérature hébraïque ! Je dus pendant longtemps promener deux livres pour lire côte à côte l’original et sa traduction. L’horreur. Ici, c’est parfaitement calibré pour les débutants : c’est beau, c’est bien, c’est court.

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Mais que dit Salomon quand la police rentre dans la synagogue ?

Ha voici une vraie question qui touche le cœur de la culture française. Il s’agit des aventures de Rabbi Jacob bien sûr. Le passage évoqué dans le titre passe peut-être inaperçu après un « Comment, vous Salomon, vous êtes Juif ? » ou encore « Rabbi Jacob il va danser », mais il est assez intéressant à étudier quand on remet le film dans le contexte de son époque.

Lorsque les policiers entrent dans la synagogue, Salomon est persuadé qu’il s’agit des assassins à la poursuite de son ancien patron déguisé en rabbin et de son acolyte révolutionnaire arabe. Salomon bondit sur la bimah (l’estrade d’où on lit la Torah), crie pour qu’on l’écoute et se met à parler une langue qui n’est plus du français. Toute l’assemblée comprend, se tourne en même temps vers les policiers, dresse les châles de prière dans les airs et fond sur les pauvres fonctionnaires du ministère de l’intérieur. Hector Pivert déguisé en Rabbi Jacob peut s’enfuir avec Slimane.

Mais que dit Salomon, en quelle langue parle-t-il ?

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